dimanche 18 mai 2014

YANN EWAN,L'ECRIVAIN BRETON DE NOUVELLE-CALEDONIE


Les Loyaltiennes le premier livre de l'écrivain Yann Ewan, "Breton des Loyauté", qui vécut à Ouvéa durant dix huit ans, n'était pas passé inaperçu! Il réitère aujourd'hui, toujours dans la collection Lettres du Pacifique dont il signe le 56ème titre, avec un nouveau recueil de nouvelles tout aussi originales et décoiffantes que les premières, dont le style est toujours caustique voire humoristique. Elles ont pour cadre ordinaire Tréméheun, ce petit village de Basse-Cornouaille où sont nés ses ancêtres:


Les Chiens de Tréméwen (Chach Tremeheun)


Yann Ewan 

est le deuxième Breton à faire honneur aux Lettres du Pacifique et de Bretagne, ainsi qu'au Cercle des Auteurs du Pacifique, avec  son originalité et sa vision dantesque du monde : que ce soit le village de Tréméven ou les îles d'Océanie, c'est la part d'ombre des hommes qui l'inspire. Le premier prix du "Cercle de la mer"a récompensé l'une de ses nouvelles en 2013. Il a écrit un premier roman, et commencé l'écriture du deuxième.

Yann Ewan l'auteur, à Ouvéa 






Extrait du livre.

"L'air était odorant, les fleurs du printemps finissant allumaient son regard celui de l'homme, s'entend! - d'un éclat malicieux. Il avait bien songé à un pommier en fleurs mais d'autres souvenirs, plus vieux, plus étrangers, peuvent guider nos pas. Alors qu'il s'approchait de la grand route pour la franchir, la chaleur de l'asphalte lui monta aussi au visage. Il s'assit entre haie et fossé, sortit son paquet de Lucky Strike et alluma une cigarette. La joie était là, toute simple, née des feuilles et des fleurs, des insectes bourdonnants, de la terre, en somme. Ses yeux ne semblaient plus quitter la pente douce et, plus loin, les frondaisons, les bois de Lamarre, plus loin. Son esprit ne se décidait pas à se poser. Il savait ce qui l'avait conduit ici, son âme était dans les entrelacs du passé aussi et toute à la plénitude de ce début d'été breton. 
Des visages et des voyages immobiles se bousculaient dans son esprit. Des traits de femme où se mêlaient l'amour et la haine. C'est une chose facile quand la femme aimée s'est éloignée et n'est plus qu'une chair odorante en mémoire. Les pavots rouges, surtout, griffaient son âme mais les blés aussi. Chagall ? Il souriait ; au bas du tableau se trouvait un clocher dressé comme celui de Saint Méen, au bourg, mais ce n'était pas Tréméven. Et puis, ce couple enlacé qui se serait bien caché derrière les fleurs si l’œil du peintre n'avait pas été, comme celui de Dieu, indiscret. Cependant, l'important n'est jamais l'homme. L'homme regarde la femme mais celle-ci regarde plus loin. Même quand elle finit par haïr. Toujours bien plus loin que le bout du monde. Quant aux boucles bleues, elles étaient là, dominant les ruines disparues du château de Lamarre. La femme est une sirène qui monte l'homme, imprudent voyageur, jusqu'aux étoiles, comme un pieu qui se tait. Ignore-t-il que, pour lui, il y a une chute ?


Yann Ewan, Les Chiens de Tréméwen (Chach Tremeheun) ©



On ne pouvait évoquer la Bretagne sans citer ce conteur et cet historien du Pacifique qu'est l'écrivain Jean Guillou, auteur de 12 livres consacrés à la fabuleuse histoire du Grand Océan, de ses navigateurs, de ses aventuriers, de ses pionniers dont plusieurs étaient Bretons.